Par Jim Jarrassé
Le mouvement des "débaptisés" s'est renforcé à la suite des propos du pape sur le préservatif © VATICAN-POOL/GALAZKA/SIPA
"Mes parents ont choisi, probablement par conformisme et respect des traditions, de me faire baptiser." Ainsi commence la lettre que Jean-Nicolas a adressé à l'archevêché de Strasbourg le 14 avril dernier. L'objectif de cette missive : être rayé des listes de l'Église catholique. "Je constate avec regret que vous me comptabilisez toujours parmi vos membres et je vous demande de bien vouloir faire cesser cet état de fait", écrit cet informaticien de 43 ans. La réponse de l'archevêché a été rapide : "En marge de votre acte de baptême a été inscrite votre intention de quitter la communauté chrétienne." C'est ainsi que Jean-Nicolas est venu grossir les rangs des "débaptisés". Comme lui, de plus en plus de Français annulent leur baptême car ils ne se sentent plus à leur place dans la religion catholique. C'est Europe 1 qui révèle les derniers chiffres : en trois mois, dans le département de l'Eure, dix-neuf demandes de "débaptisations" ont été enregistrées, contre six sur une année entière en moyenne. Dans la Manche, ce sont douze requêtes de ce type qui ont été enregistrées depuis le début de l'année, contre deux ou trois par an en temps normal. Si pour Jean-Nicolas la décision de quitter l'Église a été motivée par des raisons personnelles, beaucoup de "débaptisés" avancent d'autres motifs. Entre la mère brésilienne excommuniée après l'avortement de sa fille de 9 ans, les propos négationnistes de l'évêque Williamson , et la position de Benoît XVI sur le préservatif, les ex-catholiques n'ont que l'embarras du choix pour justifier leur geste. "Il y a un décalage de plus en plus fort avec ce pape qui nie toute réalité. C'est aberrant et dangereux", explique Thierry, un "débaptisé" de 57 ans originaire de Savoie. "Ce mouvement est une réponse à une Église qui semble se refermer sur sa doctrine en refusant de s'adapter aux réalités du XXIe siècle. Il est naissant en France et je pense qu'il prendra une certaine ampleur dans les années à venir", confirme Jean-Nicolas. "C'est comme la dénaissance, ça n'existe pas" (Évêque de Bordeaux) Sur internet, le mouvement des "débaptisés" est devenu un véritable phénomène de mode. Des groupes Facebook sur lesquels les "ex-cathos" échangent leurs points de vue se multiplient. Des rassemblements de débaptisés sont en préparation. Et des sites sont même créés pour faciliter la procédure. On y trouve par exemple un générateur de lettres types qu'il faut envoyer au curé de la paroisse où a eu lieu le baptême, ainsi qu'à l'évêché dont elle dépend. "Je pensais que ça nécessitait une procédure très officielle d'excommunication par le Vatican", se souvient Jean-Nicolas. "C'est en découvrant sur internet ce mouvement de 'débaptisation' que j'ai décidé de franchir le pas." Du côté de l'Église, on cherche à relativiser. Si l'évêque de Bordeaux, Monseigneur Jacques Blaquart, reconnaît "un coup de colère chez certains à cause des positions de l'Église", il tient à préciser que "c'est un mouvement très marginal". "J'ai reçu sept ou huit demandes. Ce sont principalement des gens qui sont distants vis-à-vis de l'Église catholique." L'évêque conteste d'ailleurs l'utilisation du terme "débaptisation" : "C'est comme la dénaissance, ça n'existe pas..." Pour l'Église catholique, le baptême est un sacrement indélébile. Mais Monseigneur Blaquart "respecte le choix de chacun", bien que chaque demande le "navre toujours". Il se console en rappelant que les baptêmes d'adultes sont toujours plus nombreux au niveau national : plus de 3.000 personnes ont reçu le saint sacrement à Pâques dernière (contre 2.500 en 2000).
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