En réponse à la crise des vocations, l’abbé Winninger publie à 89 ans un petit livre plein de vigueur en faveur du « célibat libre ». C’est-à-dire contre l’interdiction propre au catholicisme d’ordonner des hommes mariés.
Abbé Winninger, vous affirmez dans votre livre que l’obligation du célibat pour les prêtres est une « loi arbitraire ». À quand remonte-t-elle ?
Lors du concile d’Elvire, au IVe, une première législation recommande la continence et la chasteté mais pas encore le célibat. Sa véritable institution date du XIIe, avec le second concile de Latran, et ceci a été confirmé par le concile de Trente, au XVIe. C’est donc une loi canonique, disciplinaire, sans autorité scripturelle. On peut discuter ma proposition de lever cette obligation mais elle n’a rien d’hérétique. Jésus n’en dit pas un mot. L’Église a été fortement influencée par la philosophie platonicienne, qui méprise le corps…
L’argument principal en faveur du célibat est que le prêtre doit être entièrement disponible pour les fidèles, leur consacrer toute son énergie. Que répondez-vous à cela ?
J’estime que changer la loi serait un très grand bienfait mais je ne dis pas que ce serait la panacée. Je le dis clairement : je reconnais la valeur du célibat. Si l’on veut être célibataire, très bien ! S’il y a assez de célibataires, que l’on préfère les célibataires ! Mais le problème est qu’aujourd’hui les prêtres ne suffisent plus et que la pastorale n’est plus animée. Or, sans prêtre, il n’y a pas d’eucharistie, et donc pas d’Église. Le célibat n’est pas un ordre du Seigneur ; mais assurer la ministérialité, ça, c’est une obligation !
L’instauration de communautés de paroisses, avec un recours accru aux laïcs, n’est-elle pas une réponse suffisante à l’absence de prêtres ?
Je suis très heureux de cette mobilisation des laïcs, qui sont d’ailleurs à 90 % des femmes, et je souhaite que cela reste et se développe. Je ne veux absolument pas qu’en ordonnant plus de prêtres, on diminue ces correspondants laïcs. Mais un prêtre doit être présent dans chaque communauté, pour faire ce que lui seul peut faire du fait de l’ordination.
« Le pape se trompe »
Est-il courageux de prendre ainsi position ?
Vous savez, à mon âge… Quand je me suis prononcé sur ce sujet en 1977, c’était un petit peu hardi mais aujourd’hui, c’est une banalité ! Autour de moi, tout le monde est d’accord. Le problème, c’est la hiérarchie…
Craignez-vous que cette « hiérarchie » remette en cause les avancées de Vatican II ?
On ne reviendra pas sur Vatican II, c’est impossible ! Le pape actuel a la hantise de l’unité. Il espère faire revenir les intégristes, mais il n’y arrivera pas. Il se trompe. C’est sans doute une erreur presque vertueuse, mais il se fait illusion.
Se trompe-t-il aussi sur le célibat des prêtres ?
Si la situation actuelle, avec l’absence de vocations, se poursuit durant encore vingt ou trente ans, leur nombre sera si faible qu’il ne sera plus possible d’avoir une vraie pastorale et cela s’imposera : le pape suivant sera obligé de faire quelque chose. Je le dis dans mon livre : cette réforme est nécessaire et urgente.
Source ; lalsace.fr
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